Crypto-monnaies et système bancaire

De nombreux « spécialistes » crypto semblent penser que les crypto-monnaies remplaceront le système bancaire. Regardons un peu de quoi il retourne.

Car il semble y avoir un raccourci entre système monétaire et système bancaire. Entre infrastructure et organismes optimisant l’infrastructure.

Si la monnaie est le carburant des échanges humains, les banques en sont la raffinerie …

Partie 1 : L’infrastructure

A) FIAT (devises) vs cryptomonnaies : à quoi sert doit servir une monnaie

Économiquement, la monnaie doit remplir trois rôles : Intermédiaire des échanges (payer), unité de compte (compter) et réserve de valeur (être stockée).

Le premier implique d’être utilisable « partout », à minima au sein de la zone économique au sein de laquelle la devise est utilisée. Qu’il s’agisse d’espèces ou de solde de compte (M1), elle doit pouvoir servir de moyen de paiement.

Le second rôle est un peu plus difficile à appréhender. La monnaie permettant d’exprimer la valeur économique (désirabilité) d’un bien ou d’un service, elle doit permettre de les comparer dans l’espace et dans une moindre mesure, dans le temps (de compter). Ce rôle implique une certaine stabilité de la valeur de la monnaie sans quoi, le compte est faussé par l’évolution trop rapide du cours de la monnaie (en comparaisons d’autres monnaies).

Enfin, elle doit pouvoir servir de réserve de valeur, c’est-à-dire être stockée dans le temps. Si je pêche et que la saison est particulièrement prolifique, utiliser la monnaie plutôt que le troc me permet ainsi de déplacer une partie du fruit de mon travail dans le temps, à un moment où j’en aurai plus besoin qu’aujourd’hui.

Ces trois rôles s’entendent, justement, en comparaisons d’autres modes d’échanges entre êtres humains tels que le troc. C’est une manière un peu scolaire de comprendre comment et pourquoi les sociétés humaines ont, au travers du temps, adopté des systèmes monétaires plutôt que des systèmes d’échange basés sur le troc.

Cependant, aujourd’hui, on pourrait ajouter d’autres rôles que la monnaie doit remplir. Bien qu’elle soit gérée de manière indépendante du pouvoir politique dans de nombreux pays et zones monétaires (USA, UE, …), la politique monétaire fait partie intégrante de la politique économique. C’est ce que l’on appelle le policy mix en économie. D’un coté la politique budgétaire gérée par le pouvoir politique, de l’autre la politique monétaire gérée par les banques centrales.

Et l’efficacité du policy mix dépend grandement de la coordination entre pouvoir politique et pouvoir monétaire.

Comment se matérialise ce nouveau rôle de la monnaie ? La politique monétaire est pilotée par les banques centrales aux moyens des taux de refinancement des banques commerciales (les taux directeurs) ainsi que de leur capacité à les influencer indirectement en rachetant des dettes. On prend conscience de l’importance de ce nouveau rôle lors de la dernière décennie, au cours de laquelle les banques centrales ont conservé des taux extrêmement bas (voir négatifs) dans le but de stimuler une activité économique atone à la suite de la crise des subprimes. En plus d’effectuer des rachats de dette massifs. Ce qui a été appelé « assouplissement quantitatif » a consisté en une injection massive d’argent frais dans les systèmes monétaires.

Nous l’avons de nouveau vu lors de l’épidémie de Covid19. L’environnement incertain, ne bénéficiant plus d’une forte croissance économique endémique comme dans les années 60 -70, amène les autorités monétaires à endosser un rôle plus important que par le passé. Et bien que leur mission principale soit de viser la stabilité de la monnaie et des prix (enfin la stabilité relative, la cible étant tout de même une inflation de 2%), leur marge de manœuvre semble aujourd’hui plus grande que par le passé. La monnaie joue donc un rôle actif à ce jour dans la gestion de l’économie des pays et zones monétaires.